11 Déc Les luminaires du Tarot de Marseille

L’ÉTOILE, LA LUNE ET LE SOLEIL : LES LUMINAIRES DU TAROT

XVII – L’ÉTOILE

Vérité et authenticité !

Après avoir abandonné toutes nos protections égotiques, nos peurs et nos carapaces qui nous tenaient enfermés dans l’épreuve de La Maison Dieu, nous allons pouvoir faire jaillir une lumière qui n’était pas éteinte à l’intérieur de nous‑mêmes, mais qui demandait à renaître à travers notre connexion au monde céleste. Dans cette dix‑septième lame, en plus des éléments astronomiques, les quatre règnes (végétal, minéral, animal et humain) sont représentés. Pour la première fois, cet arcane nous fait pénétrer le monde du cosmos, et représente l’image de la création dans sa totalité.

Bien souvent, lorsque cette image se présente, notre « bonne étoile » et la chance nous viennent immédiatement à l’esprit. Nous aurions tort de ne pas y songer, puisque cette lame est effectivement très positive, et que le Tarot nous guide pour nous connecter à « notre étoile ». Mais cette étoile n’est pas celle que l’on croit. La porteuse de lumière autonome, en tant que relieuse à travers la manifestation véritable de notre parole, est en réalité figurée par cette femme que l’on compare souvent à la Nouvelle Ève. Elle n’est pas dans la jouissance de la création, mais au contraire dans la participation de l’oeuvre créatrice. Entre ciel et terre, après s’être dévêtue de ses habits de conformité (longtemps portés sous les commandements d’une société névrotique), son corps dénudé et sa révérence viennent nous parler d’authenticité. La nudité de l’âme peut soudain s’agenouiller et « se dire ». Celle-ci devient unifiante, universelle, reliant macrocosme et microcosme. Tout est conscience, harmonie, et l’humain sait qu’il est une parcelle de l’immensité du Grand Tout.

Le nombre « 17 » est synonyme d’espérance. Le « 8 » en est la réduction numérologique (1 + 7 = 8). Nous avons vu que La Justice symbolisait notamment l’équilibre cosmique, l’infini et la justesse. Sous l’influence de la conscience, ces deux lames peuvent donc être rapprochées comme les deux faces d’une même pièce.

Dans L’Étoile, représentation parfaite du principe féminin, plusieurs symboles évoquent notre participation à la Grande Nature. D’abord, nous constatons que les énergies qui circulaient d’une urne à l’autre dans l’arcane XIIII, Tempérance, sont désormais distribuées dans la nature. Cela nous indique bien un renoncement à toute forme de pouvoir. Cette fécondité, cet écoulement permanent et écologique, se réalisent sans épuisement, puisque L’Étoile est reliée directement à la Source. Elle purifie d’un côté l’eau stagnante de l’étang, et féconde la terre de l’autre.

Ensuite, en arrière-plan, l’oiseau noir juché sur l’arbre de la connaissance du bien et du mal est prêt à s’envoler entre ciel et terre. Associé à la parole, puisque la langue des oiseaux est une technique de décryptage et de compréhension « en profondeur » de la langue, il est symbole de l’oeuvre alchimique et représente l’Esprit et l’élévation spirituelle. Enfin, les huit étoiles qui apparaissent dans le ciel symbolisent les sept planètes traditionnelles, plus une centrale, qui pourrait être l’étoile Polaire qui a guidé les hommes, et notamment les marins depuis des millénaires. Selon de nombreuses traditions, chaque étoile est un grain d’âme à naître. Cela explique pourquoi de tous temps, l’Homme a cherché la guidance dans le ciel pour atteindre son but, ainsi que la part la plus divine de son être.

Pour conclure, et avant de poursuivre notre exploration du ciel avec La Lune et Le Soleil, cet arcane nous invite à ressentir au plus profond de nous que la lumière est là. Dans la mesure où l’on s’est agenouillé, l’ombre est reconnue comme étant l’envers de la lumière. Tout devient pur et authentique car nous avons trouvé notre place dans la grande constellation universelle.

Lumière de L’Étoile :

Trouver sa place dans le monde. Suivre sa vérité et la dire. Se mettre à l’unisson des lois ontologiques et cosmiques. Authenticité. Harmonie. Altruisme. Pureté. Confiance. Communication essentielle. Étoile guide.

Ombre de L’Étoile:

Illusions. Rêvasseries. Constructions éphémères. Laisser couler. Bavarder. Commérages. Retenir. Ne pas donner. Garder pour soi. Résignation. Blessure du féminin. Fanatisme.

XVIII – LA LUNE

Retour dans l’ombre et guérison.

Après que L’Étoile nous ait suggéré de trouver en Soi notre lumière intérieure et autonome, continuons notre exploration de la série des arcanes dits « Luminaires », avec La Lune et Le Soleil. Cette dix‑huitième lame va évoquer l’ombre et les ténèbres, mais aussi la lumière reflétée, dépendante du soleil, point de lumière cosmique central de toute notre galaxie. Si Le Soleil, nous le verrons, aborde des notions d’avenir et de liberté, La Lune nous impose d’abord un retour sur le passé, et par conséquent à tout ce qui a trait à la nécessité.

Il pourrait paraître étrange, après être entré dans le monde du Divin, en plein exercice spirituel avec la précédente lame de L’Étoile, de revenir dans la matérialité et l’intellectualité de La Lune. Mais, comme mentionné plus haut, puisque la lumière est ici réfléchie, il s’agit bien d’un retour sur Soi, d’une replongée et d’une réflexion essentielles dans notre obscurité pour arriver à la lueur du soleil.

Ce qui apparaît dans l’ombre de la psyché humaine est une occultation de la lumière dans notre tripartition fondamentale : pensée, sentiments et volonté. Cette ombre va donc s’inscrire sur trois plans de notre être, le mental, l’émotionnel et tout ce qui est en lien avec l’inconscient. Cela est illustré à trois niveaux sur l’arcane. D’abord, par le bassin et son crustacé, ensuite sur le plan médian par les chiens et les deux tours, enfin par l’astre lui-même.

Dans la partie basse, l’eau bleue symbolise ce qui est insaisissable, un liquide immobile et enfermé qui ne circule plus et engendre un pourrissement intérieur. D’où l’exigence de plonger dans l’inconscient pour aller constater ce qui est resté figé. Avec le crustacé, deux pôles sont représentés : d’une part le cancer, cette sclérose, résultat de ce que notre inconscient a fait proliférer de manière anarchique. D’autre part, le travail d’épuration de cet animal éboueur, qui crée les eaux vives et se déplace à reculons. Une troisième qualité est également proposée par cet animal : celle de muer, c’est-à-dire perdre ce qui à un moment s’est calcifié pour pouvoir grandir, mais en générant une nouvelle carapace protectrice et indispensable à la survie.

Au-dessus du bassin, l’allusion aux limites du monde connu est signifiée par les deux tours. Un couple de colonnes (les colonnes du Temple, ou les colonnes d’Hercule) marque toujours l’entrée périlleuse vers un autre espace. En abandonnant quelques protections, Le Bateleur n’aura accès au monde de l’inconnu qu’en franchissant ce seuil gardé par les deux chiens hurlants et perturbés, représentants de notre dualité.

Enfin, dans le haut de l’arcane, pôle neurosensoriel, La Lune est synonyme de pompage et d’attraction énergétiques, créatrice des cycles et marées. Vue de profil, elle ne se montre qu’à moitié, et l’interprétation que l’on peut en faire est que nous sommes toujours dans des demi‑vérités. Un aspect toujours absent de la réalité peut nous pousser à une perception fausse, à l’occultation et au mensonge.

Le nombre « 18 » de l’arcane, faculté d’intuition, est à rapprocher de La Justice (le « 8 » dans la dizaine), et de son nombre atomique, le « 9 » de L’Hermite (1 + 8 = 9). D’un côté une fonction de coupure, d’intelligence et de réelle observation de ce qui est juste. Et de l’autre, tout l’accomplissement de L’Hermite, qui a su travailler dans l’ombre pour faire rayonner sa propre lumière. Le Tarot illustre une fois de plus de manière subtile le retour en arrière.

Pour finir, La Lune est souvent considérée par les tarologues comme l’arcane de la psychanalyse et celui des artistes. Cela vient du fait qu’il nécessite d’aller observer en nous ce qui a généré l’ombre, pour que nous puissions l’accueillir et atteindre toutes nos possibilités, nos potentiels et notre imagination la plus fertile. L’artiste n’aboutit à sa véritable créativité que sur le terreau de son ombre, de ses rêves, et parfois de son désespoir le plus profond pour contacter le Rien… et donc l’Absolu.

Lumière de La Lune :

Créativité. Transformation du traumatique. Écouter ses rêves. Imagination constructive. Intuition. Patiente guérison. Lucidité.

Ombre de La Lune :

Fatalité. Attachement au passé. Victimisation. Peur. Imagination folle. Émotionnel débridé. Illusions. Sentimentalité. Sclérose. Sexualité frustrée. Dépression.

En astrologie :

L’âme. L’inconscient. Les mémoires. Le féminin. La mère. Le foyer. Le passé. La clientèle. La sensibilité. L’humeur. L’entreprise. La femme pour un homme. La nourriture. etc.

XVIII – LE SOLEIL

AMOUR INCONDITIONNEL  ET RETOUR À L’UNITÉ.

Dans l’arcane de La Lune, l’initié a traversé son obscurité pour emprunter le sentier étroit qui n’était éclairé que par la lumière reflétée, et donc le clair-obscur. Dépassant sa peur, il s’est libéré, et peut enfin accéder à l’illumination du Soleil. L’ombre s’est transformée, le Royaume de la lumière totale et triomphante s’est ouvert. Un long travail thérapeutique a été réalisé et va permettre d’éclaircir ce qui était resté inaccompli et parasitant en nous. Nous entrons dans l’amour fraternel universel, celui de l’accueil total de soi et de l’autre, pour construire la communauté humaine sur des fondations saines.

Symbole du Feu, de la création, de la vie et de la vérité, l’astre solaire, sans lequel toute forme de vie et toute mécanique biologique serait impossible, a été classé au rang des dieux par la mythologie et toutes les sociétés primitives. Sur le plan ésotérique et spirituel, cet arcane figure le moi mental supérieur, en d’autres termes : l’Esprit intelligent et sensible connecté au Divin. C’est le rayonnement de la pensée, de l’amour et de l’intelligence. Illuminant tout notre univers, Le Soleil représente ce qui est révélé et enfin dévoilé.

À cette dix-neuvième étape, au Bateleur revient la tâche de purifier l’ombre et les scories de sa personnalité remontées à la surface en les projetant sous le faisceau révélateur de la lumière de la Conscience. Du point de vue de l’individu, une énergie d’identification et une capacité de pensée créatrice sont nées de l’apparition d’une luminosité intérieure. Les rayons et le flamboiement du soleil sont descendus dans le coeur de l’Homme, qui devient lui-même soleil pour son entourage. Ce partage, cette compassion, cette attention à autrui sont représentés dans l’image par les jumeaux, sous le regard et l’influence du soleil brillant à son zénith. Les marques rouges à leur col sont les vestiges de leur attachement (voir l’arcane du Diable), et signe de leur libération. Après avoir éprouvé sentiments de séparation et d’aliénation, ils peuvent se toucher, se donner la main et se réchauffer. Le temps des retrouvailles, de redevenir un petit enfant pour entreprendre un chemin de réunification et de renaissance est venu.

L’être apprend à diffuser de la lumière autour de lui d’une manière interactive dans un environnement social et fraternel. Dans le couple, il s’agit de la quête du sexe opposé et complémentaire. Principe yang masculin cherchant son yin féminin, le conte de La Belle au bois dormant illustre à merveille cette étape majeure de l’évolution, celle des noces alchimiques, des pôles opposés, du conscient et de l’inconscient : synthèse des deux images de l’être qui conduit à la réalisation de soi.

Concernant le nombre « 19 » de l’arcane, qui a pour réduction théosophique le « 10 » (19 = 1 + 9 = 10), il est une déclinaison du 1 de la Providence : conciliation des principes opposés qui permet le retour à l’unité. Dans La Roue de Fortune (10) qui nous parlait de prise en main, l’humain, à la périphérie de lui-même, appréhende la captation de lumière d’une manière extérieure. Le Soleil ne peut entrer dans notre vie que par une prise en charge de nos responsabilités (étymologiquement : la capacité de répondre à un besoin). Alors, à l’image de L’Hermite (9) qui a su améliorer son mental et passer de l’extériorité de sa vie à l’intériorité de sa conscience, nous allons pouvoir propager notre éclat.

Pour conclure cette série d’arcanes stellaires, avec Le Soleil nous sommes face à tous les éléments de réussite et d’épanouissement. Son pouvoir nous apporte confiance, amour, grand dévouement, et contribue au bonheur de tous nos frères et soeurs. Un vent de renouveau souffle à l’horizon, et jour après jour, chaque individu à la possibilité d’affiner ses valeurs, de vivre de nouvelles émotions et d’agir, pour aller sur son chemin hors des jugements préconçus dictant ses choix jusqu’alors. Le Bateleur a trouvé des réponses grâce au livre que La Papesse lui a tendu, il accède au grand secret de la vie : tout est Un, et c’est en lui que l’être va réaliser cette unité.

Lumière du Soleil :

La fraternité. Joie de vivre. Sourire. Rayonnement. Chaleur. Réconciliation. Guérison. Union.

Ombre du Soleil :

L’orgueil. La surestime de soi. Racisme. Exclusion. Fausses constructions. Refus de la lumière.

En astrologie :

La volonté de l’Esprit. Le « JE SUIS ». Le masculin. L’homme pour une femme : le père, le mari, le patron. Là ou l’on brille. etc.